Busato

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Busato

BUSATO

Artisan luthier contemporain de Mario Maccaferri et installé en France depuis 1925, Bortolo Busato (1908-1960) fut le premier à s’être engouffré dans les copies de guitares Selmer – plus vraies que nature – qui lui valent aujourd’hui son aura et justifient la cote parfois très élevée de ses instruments.

En 1932, les guitares Selmer, conçues pour la célèbre marque d’instruments à vent par Mario Maccaferri sont immédiatement imitées avec plus ou moins de bonheur et de talent par nombre de luthiers qui déclinent, au sens propre et figuré, le concept dans des gammes de prix plus attractives que l’original. D’entre tous ces instruments, les copies contemporaines de Selmer modèle Jazz produites par Bortolo Busato demeurent celles qui ont la plus forte personnalité et valeur ajoutée tant musicale que vintage.

Bortolo Busato est né le 18 janvier 1902 à Chiuppano en Italie. Son père est menuisier et il devient lui-même ébéniste avant de quitter son pays natal. Tout comme Mario Maccaferri, et contrairement à la légende et aux autres luthiers italiens de cette génération installés en France, il ne vient pas du sud de l’Italie mais de la Vénétie au nord-est du pays. Il s’installe en France en 1925 mais ne s’inscrit au registre du commerce qu’en 1931 pour ouvrir son premier atelier de lutherie au 34, rue de Chaligny dans le 12è arrondissement. L’artisan transférera son atelier au 40, rue d’Orgemont dans le 20è arrondissement où il demeurera de 1934 à 1943.

Les années 1931 à 1943 représentent la première époque Busato. Ces modèles type Selmer n’apparaissent bien entendu pas avant le milieu des années trente mais seront les plus riches de l’ensemble de sa production avec un décorum très important. Moins onéreuses que la Selmer originale, elles pouvaient durant cette période d’avant-guerre offrir des options riches en incrustation de pacotille, une esthétique générale empruntée alors au monde du banjo. Ces guitares ne comportent pas toujours l’une des étiquettes en usage durant les années du « 40, rue d’Orgemont » ou une signature puisque beaucoup sont destinées à des revendeurs. En revanche, toutes les guitares portant l’une de ces étiquettes sont assurément antérieures à la fin de 1943. Durant cette période, il signe à l’encre ses instruments sur l’étiquette libellée à cette adresse et collée sur le fond de la guitare sous la rosace.

Dès le début de sa production de guitares type Selmer, le souci du détail dans la copie du luthier le conduit même à reproduire en tous points les étuis Selmer adaptés parfois à la taille plus forte de ses propres guitares. En juin 1942, il étend son commerce aux instruments à vent, à cordes et appareils de T.S.F. et en 1943, l’artisan ouvre une première boutique dont l’enseigne répond au nom de « Tout pour la Musique » au 140, boulevard de Ménilmontant, toujours dans le 20è arrondissement. En toute fin d’année, son atelier quitte définitivement la rue d’Orgemont pour prendre place au numéro 4, cité Griset à Paris, dans le 11ème arrondissement. Cet atelier de la cité Griset est sans doute la plus importante fabrique d’instruments de musique de tout Paris de tous les temps ! L’entreprise Busato fabrique, négocie en gros, sous-traite et fait sous-traiter des guitares, des mandolines, des violons, des banjos, des accordéons, des batteries, des trompettes, des saxophones, des clarinettes, des hautbois, des boîtes pour instruments. Tous les futurs luthiers italiens de France et de Navarre sont passés par cet atelier de la cité Griset où ils ont reçu une formation sur le tas. C’est le cas, entre autres, de Jacques Favino, de Pierre Bucolo ou encore de Pierre Anastasio.

En 1946, une autre boutique Busato « Tout pour la musique » s’ouvre au 122, rue Amelot dans le 11è arrondissement de Paris, attestant du succès de notre artisan-entrepreneur. Dès la seconde moitié des années quarante, la cité Griset devient elle aussi un point de vente. Il existe un catalogue Busato de cette période, le seul connu à ce jour, qui rend compte de cette activité généraliste domiciliée cité Griset. Il ne compte pas moins de cent trois références allant des maracas au set high-tech de batterie encore appelé alors « jazz à pied », pour certaines, elles font d’ores et déjà l’objet de sous-traitance. Le luthier se positionne dès lors en facteur de Lutherie Artistique comme le mentionne l’étiquette collée sur le tasseau supérieur de ses copies soignées de guitare Selmer. Pour autant, le milieu des années quarante fait place à une finition générale plus simple et moins luxueuse qu’avant-guerre et l’après-guerre ne verra refleurir que quelques très rares modèles surchargés dont un Grand Luxe noir ressemblant à s’y méprendre au modèle Chorus de Di Mauro. Le modèle Professionnel, le plus proche de l’esprit Selmer, est celui qui est alors le plus populaire et le plus produit. À ce propos, il faut aujourd’hui être vigilant sur les appellations souvent fantaisistes des modèles Busato que l’on rencontre ça et là.

Tous les modèles de guitare Busato type Selmer sortis et directement vendus à l’atelier de la cité Griset ou dans les magasins appartenant à Busato à partir de janvier 1944 sont authentifiables à leur étiquette sur le tasseau supérieur du manche de la guitare. Il en existe trois variantes dans leur composition : étiquettes blanches et carrées puis ovales, vertes ou blanches collées sous la rosace. Les instruments vendus directement dans la boutique du 140, boulevard de Ménilmontant présentent en plus un logo métallique en trapèze cloué sur le devant ou l’arrière de la tête des guitares. Les guitares fabriquées pour les grandes boutiques d’instruments telles Paul Beuscher ne portent parfois qu’une marque au fer sous la table. Si Bortolo Busato signe encore certaines étiquettes, c’est dans une moindre proportion qu’il fabrique encore lui-même quelques guitares à la cité Griset : il a confié la majeure partie de la production interne des façons Selmer à quelques ouvriers dont Pierre Calza qui en prendra intégralement la charge dans les années cinquante. Cet autre italien né avec le siècle avait appris son métier en fabriquant des pianos pour la célèbre maison Gaveau. Il fut l’un des plus fidèles ouvriers de Bortolo avec Pierre Fontaine.

À la fin des années quarante, la cité Griset comptait jusqu’à quarante-trois employés, dont 36 au moins officiellement déclarés, sans compter les multiples sous-traitances auxquelles Bortolo Busato faisait appel au sein même de son atelier pour la fabrication des guitares bien sûr, mais aussi pour polir les cercles de banjos de sa fabrication ou encore pour créer de nouveaux modèles d’accordéons comme l’Harmonéon, un accordéon chromatique de concert unique au monde, conçu et réalisé par Giovanni Segalla, son beau-frère.

En 1951, Bortolo Busato obtient la nationalité française et ouvre un atelier « sauvage » à son nouveau domicile du 73, avenue de Cœuilly sur le plateau de Champigny-sur-Marne dans le Val-de-Marne, en proche banlieue parisienne. Cette décentralisation, tant privée que professionnelle, va permettre au luthier d’augmenter de façon significative sa capacité de production avec six ouvriers supplémentaires mais aussi d’élargir ses horizons commerciaux. En 1952, il fait ajouter au registre du commerce les activités de « commission, importation, exportation de toutes marchandises en particulier bonneterie, instruments de musique, bois, conserves ». Bortolo Busato fournit ainsi en bois d’ébénisterie les fabricants installés à Paris dans le Faubourg Saint-Antoine, entre la place de la Bastille et de la Nation. La boutique du boulevard de Ménilmontant est alors déclarée comme succursale. Le luthier fait dorénavant sous-traiter la plus grande part des produits de son catalogue musical, à commencer par toutes les caisses de ses guitares classiques fabriquées par Pierre Fontaine. De même, la fabrication des belles reproductions de Selmer de Busato prendra peu à peu fin avec les guitares Selmer elles-mêmes. Les Busato type Selmer postérieures à 1952 ne seront bientôt plus que de petites copies de qualité très disparate, parfois assemblées avec des éléments de lutherie de sous-traitance française et italienne. Une pratique alors courante chez les Italiens de Paris. Il existe pléthore de ces petites Busato sans nom, sans marque, sans étiquette, assez fréquentes sur le marché d’occasion, et qui n’ont que peu d’attraits. Les instruments les plus corrects de cette période sont parfois encore signés et datés de la main de Busato, mais tout indique qu’ils furent fabriqués par Pierre Calza et destinés aux magasins de Bortolo Busato. En 1953, le magasin de Busato « Tout pour la Musique » du boulevard de Ménilmontant est mis en gérance à une petite société nommée « Radio, Électricité & Télévision », un signe des temps. En 1957, l’atelier clandestin de Champigny-sur-Marne est enfin enregistré au registre du commerce et prend définitivement le pas sur celui de la cité Griset dont l’activité de fabrication est alors réduite. Bortolo ajoute alors deux nouvelles activités à la société Busato : la mercerie et la lingerie ! En résumé, la fin de la troisième période Busato sonne le glas de son intérêt musical au profit d’une entreprise d’importation plus généraliste.

En pleine prospérité, sur les rails d’une nouvelle carrière d’importateur de gros en tout genre, Bortolo Busato décède le 4 juillet 1960 d’un arrêt cardiaque à Champigny-sur-Marne.

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